À la manière de tous les stakhanovistes du Black Metal qui enchaînent les albums comme j’enchaine les poignées de M&M’s au cinéma, difficile de suivre la scène danoise actuelle sans accuser ne serait-ce qu’un minimum de retard... Particulièrement effervescente ces dix / quinze dernières années, celle-ci n’en finit plus de nous régaler de sorties toutes plus réjouissantes les unes que les autres. Parmi les plus récentes, le dernier album en date de Phrenelith, groupe originaire de Copenhague dans lequel on retrouve des membres et ex-membres d’Undergang, Sequestrum, Sulphurous, Hyperdontia ou bien encore Ascendency.
Quatre ans après un très bon
Chimaera, Phrenelith nous revient donc en cette année 2025 avec sous le coude un troisième album intitulé
Ashen Womb paru cette fois-ci chez Dark Descent Records et Me Saco Un Ojo Records. Une sortie qui vient ainsi officialiser le départ de Paweł Tunkiewicz (premier batteur de Phrenelith arrivé en 2013 que l’on peut toujours retrouver aujourd’hui derrière les fûts d’Apparatus, Hyperdontia et Sulphurous) et qui depuis 2021 s’est vu remplacer par le jeune Andreas Nordgreen (Chaotian, Morgellons, Sequestrum...). Enregistré entre 2023 et 2024 au No Master's Voice Studio de Copenhague puis mixé et masterisé par Marcus Ferreira Larsen (Chaotian, Septage, Slægt, Sulphurous, Taphos, Undergang...),
Ashen Womb est illustré pour l’occasion par monsieur Dávid Glomba (Teitanblood, Malokarpatan, Cosmic Putrefaction, Cult Of Fire...). Ce dernier nous offre une réalisation plutôt sympathique et raccord avec le titre de ce troisième album mais qui à l’image de celles ornant par exemple les derniers albums en date de Mortuous et de Skelethal (pour rester dans les mêmes tons chauds) ne me touche pas outre-mesure.
Heureusement, une simple illustration, qu’elle soit bonne ou mauvaise, ne fait pas la qualité d’un album (même si elle peut évidemment y contribuer), aussi on peut comme moi ne pas adhérer outre-mesure à cette dernière et trouver malgré tout
Ashen Womb tout à fait digne d’intérêt. Car à l’image des deux albums mentionnés plus haut, celui-ci est en effet d’excellente facture.
C’est ainsi au son de "Noemata", une introduction instrumentale (exception faite de ce growl guttural entendu aux alentours de 0:50) lourde et menaçante de près de deux minutes, que les Danois vont faire leur grand retour. Une mise en bouche des plus sympathiques qui va servir à planter le décor et à poser les fondations de ces ambiances sombres et fuligineuses qui caractérisent une fois de plus ce nouvel album.
D’ailleurs, ce ne sera une surprise pour personne mais
Ashen Womb s’inscrit dans la continuité des précédents travaux de Phrenelith même s’il est juste de constater tout de même un retour vers des sonorités plus agressives et directes là où son prédécesseur laissait davantage de place aux ambiances et, comme l’évoquaient à l’époque Dysthymie et Ikea, à la gestion de ces fameux "silences". En effet, si le travail d’atmosphère effectué par les Danois reste une fois de plus à saluer avec là encore beaucoup de moments particulièrement funèbres et opaques (cette introduction évoquée plus haut ainsi que "Sphageion", interlude instrumental positionné en presque fin de parcours, "Nebulae" qui porte évidemment très bien son nom avec notamment ses deux dernières minutes très aériennes, "Ashen Womb" et ses neuf minutes particulièrement imposantes...), il n’en reste pas moins que le contraste n’est plus aussi saisissant que sur
Chimaera. Aussi les coups de matraques, démonstrations de force et autres accélérations intenses et virulentes ne manquent pas tout au long de ces trente-neuf minutes ("Astral Larvae" dès 0:05, "A Husk Wrung Dry" à 0:11, "Lithopaedion" à 0:26 et surtout 0:37, "Nebulae" à 0:30, "Stagnated Blood" à 0:06, "Chrysopoeia" à 2:25 et j’en passe) et contribuent à faire de ce troisième album un disque globalement très dynamique et presque sauvage. Un retour à une certaine brutalité qui ne devrait pas manquer d’enthousiasmer tous ceux ayant exprimé frustration et déception à l’adresse de l’album précédent. Des coups de boutoirs virils qui s’accompagnent de riffs sombres qui sans chercher à bouleverser la face du Death Metal (on ne va pas se mentir mais la musique des Danois doit en effet beaucoup à celle d’Incantation et de Dead Congregation) possèdent néanmoins une aura maléfique et s’avèrent surtout d’une efficacité absolument incontestable. Ajoutez-y quelques leads et autres solos aux mélodies sinistres et vous obtenez ce que l’on peut appeler un troisième album rondement mené.
Relégué au rang de "Déception de l’année" lors du bilan 2021,
Chimaera n’était pas parvenu à faire l’unanimité, essentiellement à cause d’une approche plus contrastée effectuée au détriment d’une certaine sauvagerie. Sur
Ashen Womb, Phrenelith semble avoir entendu les critiques et surtout chercher à rééquilibrer les forces en présence afin de gagner à nouveau en intensité et en brutalité sans pour autant reléguer aux oubliettes tout ce travail d’ambiances. Le résultat, particulièrement probant, devrait davantage séduire les amateurs de la première heure qui retrouveront ici le charme des débuts tonitruants de la formation de Copenhague sans pour autant léser ceux qui avaient su profiter des charmes pourtant indéniables de
Chimaera.
1 COMMENTAIRE(S)
17/06/2025 20:19