Mantar - Post Apocalyptic Depression
Chronique
Mantar Post Apocalyptic Depression
Sous-genre du sludge : le « party sludge », celui dont les porte-étendards ont été aussi variés que Weedeater, Seven Sisters of Sleep, 16, Fistula, Iron Monkey, Nightslug, Seum… Et rarement plus que le temps d’un album où la mixture bien connue devient particulièrement jouissive.
À cette liste officieuse, on peut désormais ajouter Mantar. Un duo autour duquel je tournais depuis de nombreuses années, trouvant dans leur sludge fortement marqué par le black metal un potentiel qui n’atteignait jamais sa pleine réalisation. À croire que cela a fatigué les Allemands qui ont décidé de me prendre par le col avec Post Apocalyptic Depression ! L’artwork de Aron Wiesenfeld a bien raison d’affubler la fille longiligne de Death by Burning d’un chapeau de fête : ces trente-cinq minutes visent l’explosion constante, l’expéditif qui s’inscrit directement dans le crâne pour ne plus le lâcher, parasitant jusqu’aux nerfs contrôlant un corps qui ne peut que bouger. Un virus qui s’attrape dans la joie, celle de tout casser, les riffs s’accumulant sans temps mort sur ces douze titres (ce qui n’empêche pas la lourdeur, cf. le final « Cosmic Abortion », sorte de compilation des éléments rencontrés précédemment les faisant s’ébrouer dans la fange).
La bonne idée qui change tout : avoir mis une grosse lampée de grunge dans sa recette personnelle, toujours incisive, toujours extrême, mais désormais bien plus rongée et accrocheuse. Post Apocalyptic Depression est une espèce de réponse à Thou et son Umbilical tourné vers un passé qu’il manipule de façon intelligente et émotive. Pas de ça ici, Mantar cherchant à broyer tout ce qui se trouve sur son chemin allant de la porte d’entrée à la tireuse à bière, prendre possession de la sono et hurler ses paroles inintelligibles aux autres fêtards soit embêtés, soit emportés avec lui dans sa hargne. Clairement, je ne fais pas partie de ceux le trouvant relou, surtout quand il sert aussi bien les cocktails molotov d’entrée de jeu, l’album commençant dans l’orgie dès « Absolute Ghost ». Entre embardées grunge (« Dogma Down » véritable exhumation du back catalogue d’un Nirvana plutôt en enfer) et punk joué le plus fort possible (« Rex Perverso » ; « Axe Death Scenario » ; « Church of Suck » : poussez-vous, j’arrive !), il n’y a pas le temps de se demander si tout cela est bien sérieux. Plutôt à accepter les coups et en donner soi-même, dans un essai revigorant à la raideur quasi-cadavérique – la voix de Hanno Klänhardt, total black metal – redonnant du sens à l’expression « à tombeau ouvert ».
C’est qu’il n’y a pas que de la haute énergie par intraveineuse dans Post Apocalyptic Depression. L’angoisse que laisse deviner son titre, si elle ne s’écroule jamais dans l’apathie, se retrouve au détour de titres où se devine une peur derrière le dégoût, sautant partout afin de contrer une menace invisible. Le début de « Morbid Vocation », « Halsgericht » ou encore « Two Choices of Eternity » l’affichent clairement : cette fête est peut-être la dernière avant la fin, d’une génération qui a déjà connu le désastre et se prépare à disparaître. Sodome et Gomorrhe en 2025, où se détruisent les montres connectées, Teslas et portables blindés d’applications bien-être par des corps qui se fracassent à ne pas s’être retrouvés depuis si longtemps.
Mais bon, on ne va pas déconner : Post Apocalyptic Depression est surtout un exutoire comme on en rencontre peu, les raisons de ses éruptions de colère exprimées le sourire aux lèvres pouvant rapidement passer au second plan si on ne cherche à écouter cette musique que pour ses riffs (qu’elle a en masse, pas d’inquiétude sur ce point). La faute à Mantar, qui n’explicite jamais, ne prend pas le temps même lors d’un morceau de poser plus profondément l’atmosphère de mort qu’il y a en sourdine sur cet album. Un regret qui pourrait être vite oublié si le duo quittait un peu sa ligne de conduite, ô combien efficace mais peut-être un peu trop protocolaire… Ah, foutus Allemands.
| Ikea 31 Mars 2025 - 633 lectures |
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3 COMMENTAIRE(S)
citer | Ca fait complètement penser à Kvelertak... sur le papier, me concernant. J'y ai plus "pensé" pour le dernier Haust, à vrai dire, ce qui est confirmé par le CV du producteur je crois, qu'ils retrouvaient de leurs débuts, après qu'il a passé pas mal de temps à faire le succès de Kvelertak, justement.
Bref, mon oreille pense principalement à Entombed et L7. |
citer | Ikea 31/03/2025 19:17 | note: 8/10 | Ah ouais ? J'ai même eu des flashs du premier Kvelertak en écoutant certains riffs bien punk et survoltés ! Mais c'est la fête post-apo ouais, ça sent l'aigreur. |
citer | Marrant, je sens pas du tout la fête, seulement l'ambiance de mort, justement. Le dégoût et l'amertume, en effet ; assourdissants. |
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3 COMMENTAIRE(S)
31/03/2025 20:03
Bref, mon oreille pense principalement à Entombed et L7.
31/03/2025 19:17
31/03/2025 11:25